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On en entend de plus en plus parler : le gaspillage alimentaire. Mais où en est-on et quels sont les chiffres ? Il faut savoir que le gaspillage alimentaire représente un tiers de la production mondiale ! En d’autres mots, plus de 30% de la nourriture produite termine à la poubelle plutôt que dans nos assiettes. On parle de 41,2 tonnes de nourriture jetées chaque seconde dans le monde, cela représente 1,3 milliards de tonnes d’aliments à l’année ! En Amérique Latine, ce sont 127 millions de tonnes de nourriture jetée chaque année, ce qui pourrait nourrir la population d’un pays comme le Pérou (32,17 millions d’habitants). Mais pourquoi les chiffres sont-ils si élevés ? Et comment limiter ce gaspillage ?

Photo by Cyrus Crossan on Unsplash

Chiffres clés à retenir sur le gaspillage alimentaire

Rien que le fait de penser que le tiers des aliments produits dans le monde finit à la poubelle me rend malade ! Pas vous ? Sur le total des aliments gaspillés au niveau mondial, on parle entre autres choses de la perte de la production de :

  • 45% de fruits, légumes et tubercules,
  • 30% de céréales,
  • 20% des légumineux et oléagineux,
  • 35% du poisson et des fruits de mer,
  • 20% de la viande et des produits laitiers.

Pour vous donner une idée, cela représente 75 millions de vaches, 763 milliards de boîtes de pâtes, 1 milliard de sacs de pomme de terre ou encore 574 milliards d’œufs.

Dans l’Union Européenne, la gaspillage alimentaire est dû à 53% aux ménages ; en Amérique Latine, c’est 28%. C’est énorme !

En France, il représente environ 30 kg par personne et par an (au niveau du consommateur final), dont 7 kg d’aliments qui ne sont même pas sortis de leur emballage. En Espagne, la moyenne est à 35 kg par an et par personne. Cela est en partie dû aux dates limites de consommation présentes sur les aliments, qui sont souvent mal comprises par les consommateurs et mal définies par les industriels. J’ai écrit un article à ce sujet ici : dates de péremption et conservation des aliments

Gaspillage alimentaire : tout le monde ne jette pas au même moment

Les causes du gaspillage alimentaire se situent tout au long de la chaîne de valeurs. En effet, les lois du marché poussent à la surproduction afin de diminuer les coûts, quitte à devoir jeter ensuite une partie de cette production. D’autre part, les consommateurs sont de plus en plus exigeants quant à la forme, couleur, texture et gabarit des aliments qu’ils ingurgitent. Les aliments qui ne rentrent pas dans les cases sont donc jetés. La nourriture a perdu de sa valeur, et nombreux sont ceux qui la jettent sans même l’avoir sortie de son emballage.

Les pays en développement vs les pays développés

Le gaspillage se situe à différents endroits de la chaîne de valeur selon les pays. En effet, selon la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture), pour les pays en développement, une grande partie des pertes (40%) se trouve au niveau de l’après récolte et de la transformation. Pour les pays développés, 40% se trouvent au niveau de la distribution et du consommateur.

Dans les pays en développement

Lorsque les pertes ont lieu dans les premières étapes de la chaîne de valeur, on comprend qu’il s’agit principalement de contraintes techniques, de stockage ou de gestion des récoltes. Dans ce cas, cela représente une perte pour les petits producteurs, et une augmentation du prix pour les consommateurs à revenu limité. On peut renforcer la chaîne d’approvisionnement grâce à des investissements dans du matériel (transport, infrastructures…) pour limiter ces pertes. Dans ce cas, il nous est plus difficile à nous, humain lambda, d’agir pour limiter le gaspillage.

Dans les pays développés

En revanche, lorsque presque la moitié des pertes se situe entre la distribution et le consommateur, on peut faire beaucoup à notre niveau ! Mais qu’est-ce-que cela signifie ? Une (trop) grande quantité de nourriture est jetée car elle ne répond pas aux normes esthétiques attendues par les consommateurs. En fait, c’est le rejet des aliments moches, biscornus ou trop petits. C’est là que l’on entre en jeu ! C’est l’attitude du consommateur qui provoque (directement ou indirectement) une grande partie du gaspillage.

Heureusement, les consciences commencent à s’éveiller, et des mesures voient le jour. C’est notamment le cas de la loi anti-gaspillage alimentaire en France, qui interdit les grossistes avec un chiffre d’affaire annuel supérieur à 50 millions d’euros de détruire les invendus et les oblige au don alimentaire. Mais cela prend du temps, et c’est le comportement du consommateur au quotidien qui peut permettre un changement plus rapide, pour que les industriels et distributeurs trouvent des solutions durables.

Gaspillage alimentaire : des solutions?

Heureusement, de nombreuses solutions pour réduire le gaspillage alimentaire voient le jour un peu partout. Qu’il s’agissent d’initiatives gouvernementales ou privées, chaque geste compte.

L’application anti-gaspi Too Good To Go

Je suis une fervente utilisatrice de l’application Too Good To Go. C’est une app qui permet de localiser les commerces dans le secteur qui composent des paniers surprise avec les invendus du jours, proches de la date de péremption. Qu’est-ce-qu’on gagne ? Des paniers d’aliments à des prix défiants toute concurrence et autant de nourriture qui ne finit pas à la poubelle ! Jusqu’à présent, c’est plus de 20 millions de paniers surprise qui ont été sauvés par cette communauté de « Waste Warriors ». Et concrètement, ca donne quoi ? Je vais chercher un panier surprise dans une boulangerie et congèlerai le pain pour ensuite le consommer petit à petit.

 

Les initiatives de nouveaux circuits de distribution

Des initiatives de nouveaux circuits de distribution et circuits courts voient le jour. C’est notamment le cas en France, avec les épiceries Nous antigaspi, dont le concept est vraiment génial: ces épiceries vendent les aliments qui sont hors gabarit, avec des dates de consommation courtes, un emballage abîmé ou encore des stocks qui sont arrivés trop tard en supermarché et qui auraient donc dû être jetés. Cela permet donc de réduire considérablement le gaspillage, et en plus les consommateurs profitent de prix en moyenne 30% inférieurs.

La Ruche qui dit oui est un réseau permettant de mettre en contact les consommateurs avec les producteurs de la région. Comment ca marche ? Il suffit de rejoindre une ruche (groupe de consommateurs près de chez vous),de passer commande en ligne des produits de la région (fruits, légumes, pain, produits laitiers, bière…), puis de récupérer la commande à la ruche le jour indiqué. Ce qui est génial, c’est que l’on sait qui est le producteur et on peut même le rencontrer quand on va chercher sa commande. 80% du tarif payé va directement au producteur, 10% à l’organisation La Ruche qui dit Oui, et 10% au chef de ruche, qui organise les collectes. Contrairement aux AMAP, il n’y a pas d’obligation de passer commande ni de payer d’abonnement. On mange frais et de saison, on peut tomber sur des légumes biscornus, trop grands ou trop petits, et surtout on soutient les producteurs locaux.

 

Et a la maison?

A la maison, on peut faire beaucoup pour réduire la quantité d’aliments qui finissent à la poubelle, voilà quelques idées :

Mieux prévoir et conserver

  • Prévoir ses repas et faire les courses en conséquence, avec une liste
  • Congeler! Pour ma part, je congèle à peu près tout! Quand je vois des légumes qui commencent à être limite, je coupe et je congèle, ou si j’ai le temps, je prépare un plat que je mets ensuite au congélateur en portions individuelles, comme ca je peut facilement organiser mes repas à emporter dans la semaine.
  • Mieux conserver les aliments: saviez-vous que l’on peut conserver une laitue plusieurs semaines? Je coupe l’extrémité du pied et la mets dans un récipient d’eau au frigo. Elle reste belle et fraîche pendant un bon moment.

Utiliser ce que l’on a avant d’acheter/jeter

  • Organiser des « sessions de vidage de placards et de frigo« . Moi, je le fais tous les 2 à 3 mois. Je fais le point de ce que j’ai en réserve, et utilise un maximum d’aliments avant d’acheter plus.
  • Donner une seconde vie aux fruits et légumes en fin de vie. Croquer dans une pomme raplapla, c’est pas le top. Mais en faire une compote, c’est une bonne idée. Pour les fruits, on peut en faire des compotes, jus et smoothies. Les légumes pourront servir en soupe ou purée.
  • Etre plus flexible sur les dates limites d’utilisation optimale.
  • Valoriser les restes. Il y a du pain qui durcit ? Il suffira d’en faire du pain perdu. Du pain dur ? On le mixe et on en fait de la chapelure pour dorer les gratins ou préparer des escalopes panées. Des blancs d’oeuf ? Pourquoi pas faire des meringues ou une mousse au chocolat ?

Eviter de jeter à la poubelle

  • Ne pas hésiter à demander un doggy bag : il arrive souvent de ne pas finir son plat au restaurant. Plutôt que de jeter le surplus, pourquoi ne pas simplement emporter les restes ? Il ne faut pas avoir honte !
  • Composter les déchets : il existe de plus en plus d’options pour les personnes qui n’ont pas la place d’avoir un composteur dans le jardin. Par exemple, on trouve des composteurs de quartier dans les villes. Peur des mauvaises odeurs avant d’aller jeter les restes au compost ? Pour ma part, comme je vis en Espagne, il fait très chaud une bonne partie de l’année. J’ai donc un récipient pour le compost que je garde au frigo, avant d’aller le jeter dans le bac à compost du quartier.

Le gaspillage alimentaire est une vraie plaie, et il faut rapidement trouver des solutions pour le diminuer. On peut tous y mettre un peu du nôtre sans pour autant se transformer en hippie. En plus de jeter des aliments en parfait état de consommation, la quantité des gaz à effet de serre générée par ces pertes est monumentale: c’est 8% du total émis. Si le gaspillage alimentaire était un pays, il serait le troisième producteur de gaz a effet de serre dans le monde, après la Chine et les Etas-Unis! Faisons un geste pour la planète et arrêtons de jeter la nourriture par les fenêtres!

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